De la désaffection à la protestation: la suite du 15-M en Espagne

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De la désaffection à la protestation: la suite du 15-M en Espagne
Enquêtes
| par Silvia De-Benito |

En avril 2006, plusieurs journaux partageaient les phénomènes suivants : la jeunesse française prenait la rue pour manifester contre la première réforme du travail ; au même moment, environ 25 000 jeunes espagnol-e-s se mobilisaient en organisant des « macro-botellón » (un grand rendez-vous pour boire dans la rue) pour saluer le printemps (1). Quelques années plus tard, on voyait une image complètement différente à la une des journaux internationaux : celle de millions d’espagnol-e-s qui manifestent pendant des semaines contre les conséquences de la crise économique. C’était l'image des «Indignés », c’était l’année de la perte de l’innocence.

Le 15 mai 2011, la société espagnole s’est réveillée et a connu des mobilisations sociales qu’on n’a pas vues depuis la Transition. Ces manifestations, spontanées au début, ont désarmé les partis politiques et les structures de pouvoir traditionnelles qui n’ont pas réussi à comprendre les causes et les conséquences de la rage des citoyen-n-es. Certains d’entre eux ont même essayé de délégitimer les protestations, affirmant que les responsables derrière celles-ci cherchaient à mettre fin à l'actuel modèle de démocratie. Au contraire, manifester contre la gestion et le modèle des institutions démocratiques doit être perçu différemment du fait de plaider contre la démocratie elle-même. Parmi les slogans les plus populaires figuraient d’ailleurs : "Nous ne sommes pas anti-système, nous sommes anti-vous", ou "démocratie réelle maintenant". Outre l'utilisation de formes traditionnelles de protestation, de nouveaux éléments ont été introduits: des campements dans les endroits d'intérêt, des réunions dans la rue,  des « escraches », des blocages aux institutions, des marches à travers le pays ou des initiatives pour arrêter les expulsions (du logement) (2).

Trois ans plus tard, alors que la crise est toujours bien présente, beaucoup se demandent où est le 15-M (3) et où sont les « Indignés ». Qu’est-ce qui s’est passé avec la masse qui manifestait et occupait les places et les rues ? La réponse : elle est toujours là. Malgré le manque de notoriété dans les médias traditionnels et dans les journaux hors des frontières espagnoles, les mobilisations continuent. La grande masse de personnes s’est scindée, et maintenant il existe un tissu social composé de groupes de travail, d’assemblées de quartier, de plateformes et de nouvelles associations et organisations. Dans plusieurs villes et quartiers, les citoyen-n-es s’organisent pour fournir les services de base que plusieurs ne peuvent s’offrir : des crèches, des écoles de musique, des bibliothèques, des centres de culture, des restos sociaux, et surtout, de nombreuses banques alimentaires. Les citoyen-n-es agissent là où l’État providence n’est plus présent. Certaines plateformes font aussi la promotion du non-paiement de la dette et de la désobéissance civile.

L’influence du 15-M s’étend partout en Espagne, mais elle est aussi très présente sur le web. La désaffection générale provoquée par la crise en conjonction avec les possibilités offertes par l’Internet ont donné naissance à un grand nombre de projets et d’initiatives solidaires, tels que les banques du temps, la monnaie sociale, le « crowdfunding » et plusieurs nouveaux médias et instruments d’information. Le journaliste Juan Luis Sánchez, sous-directeur du journal « El diario », doute que ce projet ait pu voir le jour de sans l’existence du 15-M (4). Les nouvelles plateformes citoyennes utilisent les outils informatiques pour améliorer les mécanismes de participation civiques. C’est le cas notamment pour « Que font nos députés » (http://quehacenlosdiputados.net/). Le cas le plus significatif est sans doute la « 15Mpédie », une encyclopédie en ligne développée par le mouvement 15-M, recueillant avec détail tous les événements et actions autour de ce phénomène depuis sa naissance en mai 2011. (5)

Voici quelques mouvements nés depuis le 15-M et qui comptent parmi les plus actifs aujourd’hui :

Plateforme des Affectés par l’Hypothèque (Plataforma de Afectados por la Hipoteca, PAH).

En février de cette année, 400 personnes provenant des différentes PAHs espagnoles se sont donné rendez-vous à Barcelone pour célébrer le 5ème anniversaire de ce mouvement. Née à Barcelone au débout de 2009, la PAH est une organisation horizontale, pacifique et non-partisane qui, depuis l’éclatement de la bulle immobilière, revendique le droit au logement digne. Présente dans pratiquement toutes les grandes villes espagnoles, elle agit à travers ses sections locales qui s’occupent entre autres des cas d’expulsion de logement ainsi que de la négociation d’une amélioration des conditions de l’hypothèque avec les banques. La PAH s’organise à travers ses assemblées, où sont présentés les cas de personnes ayant des problèmes avec leur hypothèque. L’organisation met à disposition l’aide légale et les ressources humaines pour trouver une solution aux problèmes pratiques, mais aussi aux problèmes psychologiques, puisque depuis le début de la crise, le taux de personnes qui se suicident après avoir perdu leur logement n’a fait qu’augmenter. L’organisation a d’ailleurs créé différentes campagnes :

  • Initiative Législative Populaire : la PAH présentait une ILP pour la dation en paiement et pour le logement social. Elle a recueilli un million et demi de signatures et a également obtenu le support des juges, du Parlement Européen et même des Nations Unies. Néanmoins, elle fut complètement ignorée par le gouvernement conservateur.
  • Stop expulsions : Cette plateforme mène des actions de désobéissance civile et de résistance passive devant les notifications et saisies d’expulsion, se concentrant à la porte des maisons touchées pour empêcher le passage des huissiers.
  • Œuvre Sociale : Compte tenu de la montée des saisies immobilières, cette plateforme propose de s'approprier des maisons vides qui appartiennent aux institutions financières. Dans les cas où les concentrations ne parviennent pas à mettre fin aux expulsions, la PAH s’occupe de reloger les familles qui ont été expulsées dans des logements squattés.
  • Dation en paiement : il s’agit de promouvoir la livraison du logement pour l'annulation de la dette hypothécaire en cas de résidence habituelle à des emprunteurs de bonne foi.

Le travail de la PAH a mérité le Prix Citoyen Européen 2013. Quelques mois plus tôt, en mars, le Tribunal Européen du Luxembourg avait déclaré que la législation espagnole en matière d’hypothèques est contraire aux droits fondamentaux. Jusqu’à présent, la PAH a arrêté 1135 expulsions et son Œuvre Sociale a relogé 1180 personnes (6).

Jeunesse sans Futur (Juventud Sin Futuro)

« Juventud Sin Futuro » est un mouvement sensible à  la situation précaire dans laquelle se trouve la jeunesse espagnole, et qui était présent pendant les premières manifestations du 15-M. L’organisation est née de l'initiative de divers groupes universitaires de Madrid qui ont constaté l'aggravation des conditions sociales des jeunes depuis les mesures prises par le gouvernement pour gérer la crise économique en Espagne. Son slogan : « sans boulot, sans maison, sans futur, sans peur » [http://wiki.15m.cc/wiki/Juventud_Sin_Futuro]. Avec une importante présence sur l’Internet, ce collectif s’est consacré à dénoncer la paupérisation des jeunes, la marchandisation du système éducatif, le manque de bourses pour financer les études, et la situation (taux, niveau) du chômage, qui touche 55,5% des jeunes de moins de 25 ans (7).

Selon eux, la réforme du marché du travail a transformé les jeunes en "travailleurs précaires pour la vie". La réforme des retraites, qui allonge la durée de cotisation et retarde l'âge minimal de départ à la retraite, est également ciblée : « si je ne peux pas travailler, comment vais-je cotiser? ». Enfin, le groupe s'insurge contre la marchandisation de l'éducation nationale. « Vous nous avez trop pris, maintenant nous voulons tout », concluent-ils. Dernièrement, le mouvement s’est consacré à dénoncer l’exil forcé auquel beaucoup de jeunes sont condamnés chaque année. C’est précisément pour cette raison que l’organisation compte sur un grand soutien à l'étranger, où les jeunes exilés se sont organisés dans plusieurs villes pour continuer à exprimer leurs revendications. Leurs dernières campagnes : « Madrid n’est pas une ville pour les jeunes », en 2014  [noesciudadparajovenes.com] et « On ne s’en va pas, ils nous expulsent » en 2013. [nonosvamosnosechan.com]. Cette dernière est une initiative qui dénonce l'exil forcé de la jeunesse précaire et montre à travers une carte les nouvelles destinations à l'extérieur et à l'intérieur du pays.

Les marées de couleurs (Las Mareas de Colores)

Chaque marée a ses propres revendications et sa propre façon de s’organiser. Mais elles ont des formes d’action similaires : assemblées, coordination avec les écoles et hôpitaux, des renfermements, etc. Car à la fin de la journée, toutes les marées signalent le même problème : l’absence de démocratie dans le pays.

La marée rouge: le droit au travail digne.

Le rouge reste toujours la couleur des travailleur-euse-s, et les espagnol-e-s n’en peuvent plus. Le taux de chômage ne fait qu’augmenter et les conditions de travail sont de pire en pire. Cette marée rouge sert donc de catalyseur pour les revendications, et permet aussi aux travailleur-euse-s et chômeur-euse-s d’exprimer leur rage. La colère et l'impuissance des citoyen-ne-s sont mieux comprises dans le contexte des déclarations faites par certains membres du patronat qui, depuis le début de la crise économique, se sont consacrés à les mépriser et à les dédaigner. Ainsi, on a entendu Monica Oriol, présidente du Cercle des Entrepreneurs, dire que le droit aux prestations de chômage encourage le parasitisme chez les chômeur-se-s. Son homologue de la région de León se demandait aussi pourquoi ce ne sont pas les travailleur-se-s qui compensent l'entreprise lorsqu’ils sont licenciés. On trouve un autre exemple du manque de respect envers la classe ouvrière avec les événements survenus au cours d’une sélection pour un (seul) poste de travail, à travers laquelle les candidat-e-s devaient rattraper un billet de 50 euros pour gagner le poste vacant (8).

La marée blanche: les soins médicaux pour tous.

Les médecins, les infirmier-ère-s, et le reste du personnel sanitaire ne capitulent pas devant les politiques libérales et manifestent fortement contre les coupures qui menacent l’universalité des soins santé. La réalité: des listes d’attente interminables et des patients décédés dans les couloirs d’hôpitaux en attendant un lit. Pour la plupart, le problème majeur demeure la ferme détermination du gouvernement en vue de privatiser le système, privilégiant ainsi les plus fortunés. Ainsi, dans la Région de Madrid, les grèves continues et une décision judiciaire défavorable ont finalement arrêté la mise en œuvre d’un plan de privatisation de 8 hôpitaux (9).

La marée verte: l’éducation.

En 2011, sous le slogan « éducation publique de tous, pour tous », la marée verte a été la première à prendre les rues pour éviter le démantèlement de l’école publique. Des professeur-e-s, des étudiant-e-s et des parents se sont exprimé-e-s contre la hausse des taxes scolaires, contre la réduction des bourses, contre l’augmentation du taux d’élèves par classe, contre le virement du personnel et contre  les réductions de salaire qui ont fortement réduit le pouvoir d’achat des professeurs. À l’origine de ce mouvement, on trouve des assemblées et plateformes de professeur-e-s et d’étudiant-e-s qui se sont rassemblé-e-s pour la cause : outre de nombreuses grèves générales ont été organisées, dans plusieurs régions, des réclusions dans les centres publics de même que des pétitions adressées aux différents gouvernements. Des professeur-e-s au chômage ont également donné des cours dans la rue. Ces revendications ne visent pas seulement à améliorer les conditions de travail des professeur-e-s, mais aussi à maintenir la qualité des services publics de plus en plus dégradés dans le contexte d’une crise économique brutale (10).

La marée violette: les féministes.

La crise économique a aussi touché les droits des femmes : les allocations familiales ont presque disparu, mais les femmes demeurent tout de même à la maison pour prendre soin du reste de la famille. En outre, les politiques conservatrices que les Espagnoles subissent depuis trois ans cherchent de manière très subtile à imposer une image et un modèle de conduite pour les femmes : c’est celui de l’épouse soumise qui reste au foyer, dont les seuls rôles et dont les seules aspirations sont d’élever ses enfants et de prendre soin de son mari. La décision du ministre de la Justice de modifier la Loi portant sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG) a été la goutte d'eau qui fait déborder le vase : son abrogation supposerait un énorme recul pour les droits sexuels et pour la santé reproductive des femmes et entraînerait un retour aux avortements clandestins, qui comportent de grands risques. Les dernières manifestations contre cette nouvelle loi, qui cherche pratiquement à supprimer le droit à l’avortement en Espagne, comptent parmi les plus imaginatives et les plus provocatrices: dans différentes villes espagnoles, plusieurs groupes de femmes se sont approchés des bureaux du Registre Foncier pour enregistrer leurs corps afin de protester contre « l’expropriation » continue qu’elles en subissent (11).

La marée grenat: les expatrié-e-s.

La couleur des passeports espagnols. La plupart de ceux et celles qui ont émigré vers autres pays n’ont pas choisi cet exil. Néanmoins, une fois à l’étranger, ils ont voulu s’organiser pour poursuivre la lutte, la protestation. Cette marée est née des convocations faites par Jeunesse Sans Futur dans plusieurs capitales européennes, en avril 2013, dans le cadre de sa campagne « On s’en va pas, ils nous expulsent » (12). À Londres, environ 300 personnes ont participé, et ont eu l’idée d’articuler un réseau international d’immigrant-e-s espagnol-e-s. À ce jour, des assemblées on lieu partout en Europe et en Amérique, notamment à Berlin, à Bruxelles, à Dublin, à Zurich, à Vienne, à Rome, à Paris, à Oslo, à Munich, à Milan, à Londres, à Lisbonne, à Montevideo, à Lima, à Mexico, à Bogotá, et à Montréal. Les assemblées de Londres et de Berlin comptent parmi les plus grandes et les mieux organisées. Les expatrié-e-s ont créé des réseaux solidaires pour accueillir ceux et celles qui arrivent et ont créé deux groupes de travail, le premier portant sur l’accès aux soins médicaux, et le deuxième sur le droit de vote depuis l’étranger  (13).

Les Marches de la Dignité

Le 22 Mars 2014 ont eu lieu les Marches de la Dignité dont le slogan était « Pain, travail et toit pour tous et toutes ». Il s’agissait de manifestations provenant des différentes régions de l'Espagne et qui ont convergé vers la capitale, Madrid. Parmi les revendications se démarquaient le refus du paiement de la dette publique, le rejet des coupures budgétaires et des slogans contre la troïka (Fonds Monétaire International, la Banque Centrale Européenne et la Commission Européenne) [le Manifeste : http://marchasdeladignidadmadrid.wordpress.com/category/manifiesto-2/]. Les manifestant-e-s appelaient aussi à la démission du gouvernement et dénonçaient la situation extrême « d'urgence sociale » dans laquelle se situe une grande partie de la population espagnole. Encore une fois les manifestant-e-s ont eu recours à l'ironie et à l'humour pour montrer leur mécontentement. Sur les affiches on lisait des affirmations significatives : « ma fille serait ici mais elle a émigré», ou « d’est en ouest, du nord au  sud, la lutte continue malgré tout »  (14). Malgré les difficultés rencontrées dans l’organisation des manifestations, malgré la violence policière, malgré le silence médiatique, les marches furent considérées comme un succès par les organisateurs-trices, qui comptaient, selon des estimations, environ deux millions de participant-e-s. Néanmoins, le cri du cœur et le mécontentement des citoyen-ne-s réuni-e-s furent ignorés par le gouvernement et par la plupart des médias de masse, qui sont déterminés à ignorer et à minimiser l'importance des mouvements sociaux qui s’organisent pourtant partout à travers le pays.

Mais le soir du 22 mars, les marches de la dignité nous ont laissé une image complètement différente de celle que l’on avait le matin même, alors que les manifestant-e-s exprimaient leurs revendications de manière pacifique et civilisée. Aux fins d’une série d'affrontements violents entre la police et les manifestant-e-s, plusieurs policiers blessés ont dû avoir recours à des soins médicaux. A l'extérieur, des protestataires blessé-e-s priaient les unités d’urgence, complices des manifestant-e-s, de ne pas secourir les policiers blessés (15). Les moments de tension vécus cette nuit-là témoignent de l'ampleur du problème qui traverse la société espagnole. Le degré de confrontation entre le peuple et le gouvernement est si extrême et la situation politique, économique et sociale est tellement désespérée qu’il a été possible d’assister à des moments qui nous font douter de notre propre humanité, de notre condition humaine.  


1)      Olmos, Juan Ramón, 18/03/11, Ideal, http://www.ideal.es/granada/20110318/local/granada/fiesta-primavera-granada-personas-201103181401.html, 29/05/2014
2)      Aloso, Zamora et Llop, 23/04/2014, Agora Blog, http://agora.vv.si/2014/04/en-profundidad-inseguridad-ciudadana-de-que-nos-protegen/, 26/05/2014
3)  Le mouvement des Indignés (Indignados en espagnol) ou Mouvement 15-M est un mouvement assembléiste et non violent né sur la Puerta del Sol, en Espagne, le 15 mai 2011, rassemblant des centaines de milliers de manifestants dans une centaine de villes. Bien que les manifestants forment un groupe assez hétérogène, ils ont en commun un désaveu des citoyens envers la classe politique, la volonté d'en finir avec le bipartisme politique entre le Parti populaire (PP) et le parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), ainsi qu’avec la corruption.
4)      Raúl Magallón Rosa , 01/07/2013, Blog Participasion, http://participasion.wordpress.com/2013/07/01/hijs-del-15-m-tecnologias-civicas-y-participacion-ciudadana/, 26/05/2014
5)      http://wiki.15m.cc/wiki/Portada, 18/05/2014
6)      http://afectadosporlahipoteca.com/, 16/05/2014
7)      Datos Macro, http://www.datosmacro.com/paro-epa/espana, 20/05/2014
8)      Jorge Moruno Danzi, 24/04/2013, Publico, http://blogs.publico.es/jorge-moruno/2014/04/24/parasitos/, 28/05/2014
9)      27/01/2014, Marea Blanca, http://mareablancasalud.blogspot.fr/, 12/05/2014
10)      http://mareaverdemadrid.blogspot.fr/, 12/05/2014
11)   http://mareavioleta.blogspot.fr/, 13705/2014
12)   Clara Blanchar, 27/05/2013, El País, http://ccaa.elpais.com/ccaa/2013/05/26/catalunya/1369595046_737060.html, 28/05/2014
13)   http://mareagranate.org/, 28/05/2014
14)  Agence, 23/03/2014, El Huffington Post, http://www.huffingtonpost.es/2014/03/22/marchas-dignidad-directo_n_5012996.html, 29/05/2014
15)  Lorenzo Silva, 24/03/2014, El Mundo, http://www.elmundo.es/espana/2014/03/24/532f6856ca4741116a8b457a.html, 15/05/2014  

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